top of page
Photo du rédacteurGautier Florian

Fiction : Mirlina Chapitre 7


Bonjour à tous ! Comment allez-vous ? Moi, ça va bien ! Même très bien ! Ouais, je sais, ça change... Mais il y a une raison à cela ! Je pars en Vacances ! Et ouais ! Repos, farniente, soleil, bronzage... Bon, il meule, mais... Pfff. Alors du coup, j'vais vous laisser un petit peu de lecture...

J'vais pas faire un pré-pavé, donc, je vous laisse tout simplement découvrir le chapitre 7 de la Duchesse Aube-Glorieuse !

Bonne lecture :)

Ps : Un autre chapitre arrivera durant mon absence. Que vous ayez de quoi lire... Et constatiez que je ne fais pas que du rien !


 

Chapitre 7 : Retour chez soi.

Citadelle des flammes infernales, près de dix sept années après le fléau.

Son corps reposait à ses pieds, perdu au milieu d'une multitude. L'assassin resserra la prise sur ses dagues tandis que l'éclat verdâtre des yeux de son ennemi se dissipait. Elle laissa son regard parcourir la masse grouillante des valeureux combattants qui venaient d'affronter la mort en face. Combien avaient péris au cours de cette bataille ? Combien durant la prise de la Citadelle, pour cette lutte insensée face à une armée qui ne pouvait jamais qu'être repoussée ? Combien parmi ceux de sa guilde ne reverraient jamais le soleil ? Combien étaient morts pour avoir cru en elle ? Ce qui aurait dû être une fête, une célébration, n'était finalement rien d'autre qu'une simple pause, un arrêt de jeu avant la reprise d'une partie morbide. De cela, elle en était sûre. Ses dagues glissèrent de ses doigts gourds cependant qu'elle s'efforçait de reprendre une respiration normale. Elle resserra ses mains sur ses armes au dernier moment, juste avant qu'elles ne tombent. À travers son bandeau trempé de sueur, elle pouvait vaguement apercevoir ses compagnons sans parvenir à définir pleinement l'expression qui marquait leur visage. Elle prit une inspiration, rangea ses lames avant de se défaire de son bandeau. Le combat était terminé. Elle n'en avait plus besoin, pour l'instant. Son regard parcourut le sommet désolé de la Citadelle. Les draeneis se regroupaient sous l'impulsion de leur chef, les orcs sous les ordres conjoints de Grommash et Durotan. Une grimace déforma le visage de l'elfe en voyant Grommash parler de liberté, lever sa hache et se pavaner comme s'il avait toujours été un héros. Le héros que les orcs voyaient en lui. Le héros qu'elle ne pourrait jamais voir en lui. En repensant à Garrosh et ses exactions, elle se dit que la pomme n'était pas tombée très loin de l'arbre. Ils étaient pourris, l'un comme l'autre. Mais ce n'était plus son combat.

Mirlina dénombra ses compagnons. Les blessures marquaient la chair, l'âme. Mais rien d'irréversible, à première vue. Ils inclinèrent la tête à son égard, lui rendant son regard et elle leur offrit une révérence. Une odeur de victoire embaumait l'air tandis que les autres guildes commençaient à apporter tonneaux, festins, à sortir leurs instruments pour libérer une joie explosive. L'assassin haussa les épaules à l'égard de ses obscurs avant de quitter les lieux. C’était un message simple : Faites comme vous voulez, moi je n’y prendrais pas part. Gul'dan n'était plus là, envoyé par Archimonde en un lieu inconnu. Alors qu'elle s'envolait loin de la Citadelle sur le dos de son drake du vol rouge, de sa liée en guerre, qu'elle perdait son regard à travers une forêt de Tanaan en partie ravagée par la guerre et la corruption, elle repensa aux mois qu'elle avait passé sur cette terre alternative. Elle avait fini par se faire à ce climat, à ces zones aux paysages riches et variés. Elle avait commencé à s'habituer à la nourriture. Elle avait goûté à l'espoir au sein de son fief, dans ses appartements, seule face à elle-même. Une vie de débrouillardise qui s'offrait à elle lorsqu'elle était seule dans la base. Une vie loin de la guerre, loin des conflits. Sans l'odeur de la mort qui empeste l'air ou celle de la corruption. Elle s'était prise à rêver d'une vie sereine. De déposer les armes. Mais l'univers jouait encore un mauvais tour. Une nouvelle menace s'apprêtait à surgir, elle le savait, elle le sentait.

Gul'dan a été envoyé en un lieu inconnu. Lui vivant, rien n'est terminé.

Mais où ? À quelle fin ? Pourrait-elle rallier les troupes ? Elle ne cessait de se demander comment sa guilde tenait, quels liens unissaient ses membres. Pouvait-elle revenir leur demander main forte ? Les unifier une nouvelle fois pour la lutte, tout en sachant qu'elle-même ne croyait plus à l'espoir d'une vie libérée de ces affrontements incessants, de cette promesse qu'elle leur avait faite il y avait bien longtemps.

Je suis... épuisée...

Le dragonne sentait le désespoir de sa cavalière et usait de leur lien pour essayer de la réconforter.

- Ils te suivent parce qu'ils savent que tu as raison. (dit-elle.)

- Mais je n'ai aucun espoir à offrir. Aucun lendemain qui ne soit le fruit du combat. Peut-être ne faisons-nous que nous débattre face à une immensité qui nous engloutira, quoi qu'il arrive. Peut-être ne faisons-nous que retarder l'inévitable et causer plus de souffrances en retour... Peut-être est-ce... Inéluctable.

- Si tu penses ainsi, tu as déjà perdue.

- Peut-être bien que c'est le cas...

- Où est la combattante valeureuse qui s'est dressée face au fléau ? Au vol noir ? À la Horde de Fer et même, à la Légion ? Où est celle qui a gagné mon respect, ma confiance, le soutien de mon vol dans sa lutte contre Neltharion ?

- Un soutien dont je n'ai pas été digne, au vu de nos performances face à Aile-De-Mort.

- Tu as payé un tribut des plus lourds, il est vrai. Mais cela ne change rien aux exploits de ton groupe, à la volonté qui vous anime. À ce que vous pouvez encore accomplir, tant que vous serez animer par des sentiments aussi nobles.

- L'ombre menace, Kalahastraz. Elle s'étend, toujours plus noire, plus insidieuse.

- Je sais, mon amie.

- J'ignore comment lutter contre ce mal qui ronge les mondes.

- Comme tu l'as toujours fait. Ne désespère pas. La Légion a déjà été vaincue par le passé, repoussée de ce monde pendant des milliers d'années.

- Et les voilà de retour.

- Nous les repousserons, une fois encore.

- Comment peux-tu en être aussi sûre ? Chaque menace que les peuples parviennent à vaincre laisse des marques. Nous sommes affaiblis, blessés. Notre nombre diminue. Combien de temps encore avant que nous ne soyons plus à même de poursuivre le combat, incapable de lever des armées pour nous battre ?

- C'est vrai, le combat vous coûte beaucoup et semble ne jamais devoir s'arrêter. Pourtant, vous tous qui le poursuivez êtes plus que de simples soldats ou mercenaires. Vous êtes des héros, Mirlina.

- Des héros ?

- Bien sûr. Votre force grandit, vos sens, vos capacités, s'affûtent. Vous ne cessez d'apprendre, d'évoluer pour affronter les nouvelles menaces avec plus d'efficacité. Et si tu ne veux pas que tes amis à travers les combats soient morts en vain, tu dois te battre. Pour ne jamais trahir leur mémoire. Ils sont morts pour que vous puissiez poursuivre la lutte.

L'assassin médita les paroles de sa liée en guerre, la tête inclinée sur le côté.

- Il y a... du vrai dans tes mots.

Cette réponse réjouit la dragonne qui laissa échapper un rugissement.

- À la bonne heure. Courage, Duchesse. Tant que nous ne perdons pas espoir, nous pouvons gagner.

L'elfe opina pour elle-même. Des battements d'ailes alentours la tirèrent de ses pensées et elle se cambra sur sa fière monture pour voir ce qui causait un tel boucan. Tout autour d'elles, de nombreuses créatures volaient pour les encercler. Mais il n'y avait nulle menace dans leur approche. Sur chacune d'elle se trouvait un cavalier, qui regardait l'Obscurcia d'un air déterminé.

- Ils te soutiennent, Obscurcia. Ils ont choisi de se rallier à toi.

L'assassin demeura silencieuse, mais l'émoi se lisait dans son regard. Tant que ses compagnons étaient avec elle, tant qu'ils étaient prêts à lutter à ses côtés, elle n'avait pas le droit d'abandonner, de perdre espoir. Elle leur devait de devenir meilleure.

Alors que le groupe quittait la jungle pour survoler Talador en direction des montagnes givrées de la crête de givrefeu, la voleuse flatta l'encolure de sa dragonne, résolue à aller de l'avant. Elle avait eu dans l'idée de trouver le repos, la paix. De s'installer définitivement loin de la guerre, peut-être même en ce monde. Mais elle ne pouvait pas tourner le dos à ses responsabilités, à qui elle était. Son rêve ne devait peut-être rester que cela. Ce rêve, cet avenir, loin de la guerre, qu'elle avait fait à de nombreuses reprises, comme une vision... Installée au coin du feu, dans une maison de taille modeste, elle lisait un ouvrage. Quelqu'un dont elle ne pouvait voir le visage approchait dans son dos, glissant ses bras autour de son cou, langoureusement et elle agrippait délicatement ses mains tandis qu'on l'embrassait à la commissure de ses lèvres. Elle frissonnait à chaque fois à ce moment là. De plaisir. Et face à elle, jouant par terre, un enfant...

- Tu es bien songeuse. (fit la dragonne.)

Mirlina se détourna de ses pensées, ses espoirs, revenant au moment présent et secoua la tête avec ironie.

- Ce n'est rien.

- Alors, Duchesse, quels sont tes projets ?

Elle resta silencieuse un instant, les mots de Lühanne se confrontant à son rêve. Pas pour le moment... Peut-être un jour...

- On retourne en Azeroth. Et on se tient prêts.

- C'est toi qui décide !

La dragonne accéléra et leurs compagnons firent de même. Azeroth... Le monde qui connaissait une apocalypse tous les deux ans, ou presque. Mais elle ne pouvait échapper à tout ça. Qui plus est... Elle devait rendre visite à quelqu'un.

Près de sept année après le fléau, vallée de strangleronce.

Le gorille se déplaçait avec prudence, jetant des regards anxieux tout autour de lui. Au milieu de la clairière, un tas de baie l'attendait. L'animal savait que ce n'était pas normal, même s'il était bien incapable d'en comprendre la raison. Son instinct lui disait de se méfier, sa faim de continuer. Et il avait très faim. Après bien des minutes à faire des cercles de plus en plus réduits autour des baies, il se jeta dessus et les avala par poignée. Quelque chose le fit bondir sur ses pattes. Un bruit, presque imperceptible, qui fit dresser ses oreilles. Une odeur étrange qui hérissa ses poils.

Le tigre était caché dans les fourrés, lorgnant sur sa cible, prêt à lui bondir dessus. Il s'approcha encore un peu. Le gorille commençait à s'agiter, tapant des poings sur le sol, criant. Le tigre jaillit de sa cachette au moment où sa proie prenait la poudre d'escampette. Une course poursuite s'engagea alors dans un concert de hurlements. Après quelques foulées, le tigre ralentit, soudain inquiet. Il venait de repérer quelque chose à son tour, une odeur dans l'air.

Mais trop tard. La dague de l'assassin jaillit et pénétra sa gorge. Le tigre s'écroula au sol dans un râle, mort. Mirlina sortit de sa cachette et récupéra son arme. Puis, elle attacha les pattes arrière de l'animal et le traîna derrière elle. Lentement. Très lentement.

Il pèse lourd ! Geignit-elle pour elle-même. Elle n’aurait su dire combien de temps il lui fallut pour traîner la carcasse jusqu’à son camp. Mais une chose était sûre : Cela avait été bien long ! La jeune femme tira dans un dernier effort, un dernier grognement douloureux avant de se laisser tomber lourdement au sol, en sueur. Son cuir lui collait à la peau. Elle allait encore devoir aller se rafraîchir. Heureusement que son campement se trouvait aussi près de l’océan. Elle commença à se déshabiller, s’arrêta en plein milieu, jetant des regards alentours pour en venir au corps du tigre. Après quelques instants de réflexion, à savoir comment dissimuler le cadavre, elle décida de ne rien faire. De toute façon, elle n’avait aucun moyen de le mettre hors de portée. Mirlina s’étira, défit sa ceinture, laissant tomber ses armes, puis s’avança vers l’eau. Elle s’arrêta près de son invitée, toujours assoupie et la dépassa sans lui prêter plus d’attention. Ses vêtements jonchèrent le sol entre la Kal'Dorei et l’océan.

Quinze minutes plus tard, la jeune femme revenait dans son camp. Le tigre était toujours là, la druidesse n’avait pas bougé. Mirlina se sécha et commença à se rhabiller. Cela faisait deux jours qu’elle traînait dans cette forêt pour prendre soin de son assaillante. Deux jours… Elle fouilla le camp à la recherche de ses dagues avant de pousser un long soupir.

- Rends les moi, druide. (dit-elle.)

Celle-ci ne bougea pas.

- On va pas y passer la nuit. Dépêche. Dans ton état, elles ne te serviront à rien.

La druidesse se retourna finalement, dévisageant la sindo’rei sans mot dire. Son regard était dur. Méfiant.

- Mes dagues. (continua Mirlina, en commun.)

- Quelle garantie ai-je ? (répondit la druidesse dans un commun peu assuré, avec un fort accent.)

- Si j’avais voulu te tuer, ce serait déjà fait.

La druidesse réfléchit à l’affirmation, regarda ses mains qu’elle tendit.

- Tu m’as agressé. C’est une simple prévention.

- Qu’allez… vos ? Vous ? (La druidesse hésitait, bégayait. Mirlina comprenait qu’elle n’était pas douée pour le commun.) faire de moi ?

- Rien. Tu pourras partir quand tu le voudras, ou quand tu seras remise. (fit Mirlina dans la langue Kal'Dorei.)

Son interlocutrice tiqua de l’entendre converser dans sa langue. Mirlina n’était pas sûre d’avoir totalement bien prononcé sa phrase et espérait que la druidesse n’avait pas mal compris ce qu’elle venait de lui dire. La jeune femme avait toujours été douée avec les langues mais son apprentissage du Darnassien n’avait réellement débuté qu’une année auparavant et malgré les similitudes nombreuses et évidentes avec sa propre langue, elle n’en demeurait pas moins délicate à maîtriser. Surtout en un temps aussi court.

La druidesse dévisageait Mirlina depuis quelques secondes, sans mot dire. Finalement, elle fit glisser les dagues devant elle et les tendit à la voleuse, qui s’en empara calmement, avec des gestes lents. Elle hocha la tête à l’égard de la druidesse, puis se dirigea vers le corps du tigre qu’elle tira de nouveau pour l’amener au milieu du camp. Elle attrapa une de ses dagues et commença à ouvrir le cadavre. La druidesse grimaça en s’asseyant.

- C’est le repas. (commenta Mirlina sans la regarder.)

- Non merci.

- Ah. Druide. Les protecteurs de la nature. Vous ne mangez donc pas de viande ?

- Si. Mais je ne me sens pas d’avaler quoi que ce soit d’aussi consistant à l’heure actuelle… Vous n’auriez pas des baies ?

- Dans la sacoche, là-bas. (indiqua Mirlina d’un geste vague.)

La druidesse regarda dans la direction indiquée, pour posa de nouveau son regard sur son hôtesse, tendant les mains devant elle.

- Ça risque de s’avérer compliqué.

Elle tapota l’épaule de Mirlina du bout des doigts. La jeune femme se retourna, considéra la druidesse.

- Si je te détache, que va-t-il se passer ?

- Rien. Je vous le promets.

- Je vais devoir te croire sur parole.

La Kal'Dorei ne répondit rien. Après quelques secondes, elle baissa les bras. Mirlina retint la corde de sa dague, coupant les liens. Puis, elle retourna à la découpe du tigre. La druidesse observa son hôtesse, silencieuse, puis les fourrés proche. Il lui serait aisé de s’enfuir ou de l’attaquer. Il lui serait aisé de… Ses yeux se posèrent sur sa blessure qui avait été recousue. Ses doigts glissèrent sur les fils. Elle grimaça et considéra de nouveau la sindo’rei. Elle l’avait sauvé. Et elle n’en comprenait pas la raison. Pas alors qu’elle avait manqué la tuer… La druidesse éprouvait… de la reconnaissance. Elle se saisit de la sacoche, l’ouvrit et mangea quelques baies. Elles étaient un peu sèche, mais demeuraient délicieuses. Surtout au vu de la faim qui la taraudait.

- Quel est ton nom ? (s’enquit l’assassin sans se retourner.)

La druidesse regarda la queue de cheval de la jeune femme, hésitante.

- Lühanne. (finit-elle par dire, entre deux bouchées.)

La sindo’rei opina.

- Je m’appelle Mirlina.

Le silence retomba, ponctué par les grognements de l’assassin qui dépeçait l’animal. Lühanne se décala un peu pour mieux l’observer, voyant une partie de son visage, tout en continuant de vider la sacoche, sans y prendre garde.

- Merci. (dit-elle après un moment.) Merci.

Mirlina hocha la tête.

- Tu devrais être capable de te déplacer dès demain. Après une bonne nuit de repos et un ventre plein.

- Me déplacer… Comptez-vous m’emmener quelque part ? (s’enquit la druidesse, sur la défensive.)

Mirlina tourna la tête vers son interlocutrice, posa sur elle son regard bleuté.

- Je t’ai attaché par précaution. Tu n’es pas ma prisonnière, Lühanne.

La druidesse dévisagea sa sauveuse longuement, sans mot dire, troublée. Elle s’humecta les lèvres.

- Pourquoi ? (demanda-t-elle finalement, baissant les yeux, honteuse.) Pourquoi m’avoir sauvé ? Après…

Mirlina haussa les épaules.

- Pourquoi pas ?

- Je ne comprends pas…

- Il n’y a rien à comprendre, druidesse. J’ai estimé que te sauver était une bonne idée, voilà tout. De toute façon, je ne fais pas de prisonnier. Je vais te chercher de nouvelles baies.

Lühanne regarda la sacoche et constata qu’elle l’avait vidée.

- Oh, je…

Mirlina tendit la main et attendit que la druidesse lui donne le conteneur, ce qu’elle fit. Puis, elle rangea ses dagues et quitta le campement.

Lühanne était encore là à son retour, ce qui étonna la jeune femme. Elle s’était attendue à ce que la druidesse fuit dès son départ. Au lieu de ça, elle avait aménagé un peu le campement, préparé du bois pour le feu et terminé de s’occuper de la carcasse du tigre. Mirlina resta coi. La druidesse lui offrit un sourire.

- Vous avez été longue.

- Les baies sont assez loin d’ici. Je ne m’attendais pas à ce que tu sois encore là.

- J’ai pensé partir. (avoua-t-elle.)

- Pourquoi être restée ?

Elle haussa les épaules, un sourire sardonique sur les lèvres.

- Pourquoi pas ?

Mirlina lui sourit avant de lui tendre la sacoche.

- Régale-toi.

- Merci.

L’assassin rejoignit le centre du campement et alluma un feu avant de préparer son dîner. Le soleil, orangé, disparaissait derrière les cimes des arbres, laissant place à une nuit étoilé. Le feu crépitait, les flammes dansaient, créant des ombres mouvantes, parfois angoissantes autour du camp. Mirlina mangeait, silencieuse. Lühanne respectait cette volonté. Elle ne savait de toute façon pas quoi dire pour rompre le silence mais ne pouvait s’empêcher de regarder de temps à autre son hôtesse. Elle pouvait presque jurer que celle-ci feignait de ne pas la voir… Presque. La druidesse se massa la nuque et s’allongea près du feu. Elle se sentait… incertaine.

Mirlina termina son repas et but de l’eau avec avidité sans quitter Lühanne des yeux. Pouvait-elle lui faire confiance ? Dormir là, près d’elle, se détendre ? Le regard de la druidesse était étrange. Elle y voyait l’incertitude, l’inexpérience, la fragilité. Pourtant, il y avait bien plus, elle le sentait. Son corps était couvert de cicatrices, comme le sien, témoignant d’une vie de bataille. Sauf que celles de la druidesse étaient bien plus nombreuses, bien plus profondes… Bien plus vieilles. Elle devait être âgée. Très âgée. Mirlina l’imaginait sans peine avoir au moins quelques millénaires. Alors pourquoi un regard si jeune, si doux ? Comme si les années avaient été effacées de son esprit… La jeune femme balaya ses questionnements d’un geste las, s’étira paresseusement. Elle ne dormirait que d’un œil, et voilà tout. Elle s’allongea, plaça une dague sous ce qui lui servait d’oreiller. Et ferma les yeux.

Une ombre se mouva dans le campement, brièvement éclairée par les flammes mourantes du feu. Elle se faufila jusqu’à la couche de Mirlina, se posta au dessus d’elle… Et la dévisagea. Longuement. Le souffle court. Irrégulier. La bouche entrouverte et tremblante. Elle plia lentement les bras, glissant vers la sindo’rei. Celle-ci bougea doucement et l’ombre se figea. Mais Mirlina semblait toujours endormie, aussi reprit-elle sa descente. Ses lèvres frôlèrent celles de l’assassin avant de s’y unir avec tendresse. Mirlina, les yeux entrouverts, plaça une main derrière la nuque de Lühanne et lui rendit son baiser. Son autre main glissa de sous son oreiller, délaissant son arme, puis continua le long du corps en partie dénudé de la Kal'Dorei. Elles n’échangèrent pas un mot, continuèrent de s’embrasser. De se caresser… De se déshabiller. Avec fougue. Avec passion. Cédant, l’une comme l’autre, à un besoin sauvage et indompté. Le temps d’une nuit.

À son réveil, Mirlina remarqua immédiatement l’absence de la druidesse. Elle n’en fut pas surprise. Mais peut-être un peu déçue. Elle avait l’habitude des aventures sans lendemain. Pourtant, cette nuit, elle avait eu l’impression que quelque chose de plus profond s’était noué entre elles. Mais peut-être n’était-ce que son imagination. Elle se leva en grommelant. Elle ne devait pas y penser. La jeune femme s’habilla, rangea ses affaires avant d’effacer les traces de son camp. Puis elle rejoignit Baie-Du-Butin. Les gobelins acceptèrent de lui fournir une monture volante pour rallier Lune d’Argent. À un prix exorbitant, cela allait sans dire. Mais le gain de temps serait considérable.

Elle mit trois jours pour rallier Lune d’Argent. La cité elfique peinait encore à se redresser de la terrible invasion du fléau. Mirlina enfila un bandeau sur ses yeux avant de rejoindre les grandes portes. Ainsi dissimulée, elle ne craignait aucun commentaire sur ses yeux, qui pourraient la faire passer pour une queldo’rei et lui voir interdire l’accès à la cité, ou pire. Elle traversa les rues où se massaient nombre de pauvres sans abris d’un pas rapide, lâchant de temps à autre une pièce d’argent sur son passage pour rejoindre la place centrale de la ville, passant devant la maison des Aube-Glorieuse à laquelle elle n’accorda aucun regard. Mirlina rejoignit la taverne la plus proche et déposa une bourse sur le comptoir.

- Je veux une chambre. Pour quelques jours.

- Une préférence ?

- Laisse Sally, je m’en occupe.

Mirlina se figea en entendant cette voix, se tourna lentement et croisa son regard.

- Ça faisait longtemps, Mirlina.

Celle-ci se pinça les lèvres, confuse et retira son bandeau.

- Salut, Mirièl…

10 vues0 commentaire
bottom of page